Le manuscrit inachevé de Franck Thilliez

 

 

« Un roman est un jeu d’illusions, tout est aussi vrai que faux, et l’histoire ne commence à exister qu’au moment où vous la lisez ».

 

 

Résumé éditeur :

Aux alentours de Grenoble, une voiture finit sa trajectoire dans un ravin après une course-poursuite avec la douane. Dans le coffre, le corps d’une femme. À la station-service où a été vu le conducteur pour la dernière fois, la vidéosurveillance est claire : l’homme n’est pas le propriétaire du véhicule.

Léane Morgan et Enaël Miraure sont une seule et même personne. L’institutrice reconvertie en reine du thriller a toujours tenu sa vie privée secrète. Sa vie ? Un mariage dont il ne reste rien sauf un lieu, L’Inspirante, villa posée au bord des dunes de la Côte d’Opale, et le traumatisme de l’enlèvement de sa fille Sarah. L’agression soudaine de son mari va faire resurgir le pire des quatre dernières années écoulées.

Dans le vent, le sable et le brouillard, une question parmi d’autres se pose : vers qui, vers quoi se tourner, quand l’unique vérité est que tout vous devient étranger ?

 

 

 

« Vous expliquez comment détruire de l’ADN à l’eau de Javel, vous rappelez que la chaux vive permet d’enterrer les corps sans laisser de traces ni d’odeurs, vous dévoilez certaines techniques de la police. Vous n’avez pas peur que cela ne nuise aux vrais flics ? Que des personnes malintentionnées puissent utiliser les idées de vos livres à mauvais escient ?

– L’éternel débat… Nous, les écrivains de romans policiers, participons à accroître la violence dans le monde, c’est cela ? Croyez-vous que les gens malintentionnés, comme vous dîtes, attendent mon livre pour passer à l’acte ? Qu’ils vont s’en servir comme d’un livre de recettes ? Quelqu’un qui commet un meurtre ou un viol frappe par pulsion, par haine, par colère, ou à cause de son enfance. Le roman n’est qu’un prétexte ou un élément déclencheur, si vous voulez ».

 

 

Bon, un Franck Thilliez, reste toujours un excellent moment de lecture… et celui-ci n’a pas dérogé à la règle ! Excellente mouture avec comme héroïne, une auteure de romans policiers bien noirs… et je pense que ce roman permet à Franck Thilliez de nous donner des clés sur son quotidien d’écrivain. Il nous fait également des clins d’œil amicaux vers Stephen King, Maurice Leblanc et surtout Conan Doyle avec son Sherlock. Trois auteurs que j’aime beaucoup, j’ai donc apprécié. Ici, la région de Berck, en plein hiver, est pratiquement un personnage à part entière. Des conditions météorologiques dantesques, une mer démontée, des marées maitresses du temps… wahou, je ne suis pas certaine d’avoir envie d’y aller en vacances, ça fait froid dans le dos et ça rajoute à l’angoisse de l’histoire. Car elle est bien glauque et terrible cette histoire de disparition de jeunes filles, de tueurs en série, comme ce « voyageur », désormais en prison, mais qui aurait kidnappé, torturé et tué 9 jeunes filles dont Sarah, la fille de Jullian et Léane, auteure célèbre de thriller. On suit Léane qui pense comme la police que Sarah est morte sous les coups de ce fameux voyageur, et attend qu’il livre enfin le lieu où se trouve son corps pour essayer de faire son deuil, 4 ans après l’enlèvement. Elle ne vit plus avec son mari Jullian qui lui, continue ses recherches pour retrouver Sarah, vivante, et qui sombre dans l’alcool, la dépression. Elle vient de revenir depuis peu dans leur villa, l’inspirante, maison complètement isolée, posée au bord des dunes de la Côte d’Opale et qui lui rappelle tant sa fille disparue, quand elle apprend l’agression de son mari, retrouvé amnésique. Commence alors un long chemin en enfer… Léane va reprendre l’enquête de son mari avec tout ce que cela comporte de part d’ombre, d’obsession et de violence. Par ailleurs, on suit aussi V & V, deux flics, Vic et Vadim, qui mènent l’enquête sur l’accident d’une voiture suite à un vol dans laquelle on retrouve un corps sans main, avec le visage écorché et énucléé, ainsi que deux mains à côté du cadavre mais qui n’appartiennent pas à ce dernier. S’ensuit aussi pour eux une longue enquête, difficile, peuplée d’horreurs…. On suit en particulier Vic, qui a une particularité : il est hypermnésique. Il n’oublie rien. Les bons moments comme les mauvais. Et dans sa vie de flic, les horreurs font malheureusement son quotidien. Comme Vic dit dans le roman, sa mémoire est une poubelle. Comme souvent avec Franck Thilliez, la mémoire a un rôle prépondérant dans ses intrigues. Et comme souvent aussi, les pistes sont nombreuses, et il sait admirablement bien, perdre ses lecteurs pour mieux les surprendre à la fin.

En parlant de fin, j’ai l’impression d’être un peu la seule à être un peu frustrée, voire plus, et même un peu en colère, par la fin de ce « manuscrit inachevé », qui pourrait tout autant s’appeler « roman inachevé ». Bien sûr, l’auteur nous livre en toute fin du livre les explications concernant cette folle intrigue, mais tout de même, à la toute fin, c’est quand même nous, lecteurs, qui choisissons notre fin. J’ai horreur de ça, d’autant que je ne pense pas qu’il y aura une suite… Enfin, cela n’enlève en rien au plaisir de la lecture de ce thriller… je recommande, bien sûr !

 

 

 

« Quand on est persuadé de quelque chose, toutes les coïncidences auxquelles on ne prêterait même pas attention d’ordinaire se transforment en indices. En éléments qui ressemblent à des messages qui nous sont adressés. Alors que ça ne reste que des coïncidences ».

 

 

Lien vers la fiche du livre sur Babélio

https://www.babelio.com/livres/Thilliez-Le-manuscrit-inacheve/1026629

 

 

 

« La mémoire est extrêmement complexe, elle peut parfois nous jouer des tours et créer de faux souvenirs. Elle a horreur des vides et les comble d’elle-même lorsque c’est nécessaire ».

 

 

 

« Son mari n’avait plus de mémoire et lui léguait le plus ignoble des romans inachevés.

C’était à elle d’en écrire la suite ».

 

 

 

« — On a déjà eu Docteur Watson, je parierais pour Professeur Moriarty, lança Vic. Le grand méchant des romans de Conan Doyle.

— De vrais petits comiques… »

 

 

 

« — Et alors ? C’est la meilleure, celle-là ! Et lui, il ne s’est pas inspiré de Misery de Stephen King ? Et tant qu’on y est, on va aussi attaquer tous les écrivains qui pondent une histoire d’amour impossible en les accusant de plagier Roméo et Juliette ? Je ne vois vraiment pas où est le problème. Et puis, La Fin de l’histoire, Le Manuscrit inachevé, ces titres n’ont rien à voir.

— Oui, enfin, tu colles un roman inachevé à la fin d’une histoire, t’as le livre complet.

— Ha, ha… »