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Le carnaval des ombres de R. J. Ellory

« Il entendait toujours la voix âpre de Jimmy Travis disant : Bon Dieu, mon gars, t’es bien le fils de ton père… Jamais, songea-t-il. Jamais, jamais, jamais. Mais le doute était là. La graine était semée. Il sentait ses racines hésitantes et fragiles s’enfoncer dans le terreau de son esprit, et il ne pouvait rien faire pour l’empêcher. »

Résumé éditeur :

1958. Un cirque ambulant, avec son lot d’attractions et de bizarreries, vient de planter son chapiteau dans la petite ville de Seneca Falls, dans le Kansas. Sous les regards émerveillés des enfants et des adultes, la troupe déploie un spectacle fait d’enchantements et d’illusions. Mais l’atmosphère magique est troublée par une découverte macabre : sous le carrousel gît le corps d’un inconnu, présentant d’étranges tatouages. Arrivé sur les lieux, l’agent spécial du FBI Michael Travis se heurte à une énigme qui tient en échec ses talents d’enquêteur. Les membres du cirque, dirigés par le mystérieux Edgar Doyle, ne sont guère enclins à livrer leurs secrets. On parle de magie, de conspiration. Mais l’affaire va bientôt prendre un tour tout à fait inattendu.

Avec cette magnifique évocation de l’Amérique rurale de la fin des années 1950, R. J. Ellory nous offre, une fois de plus, un roman qui touche en plein cœur.

768 pages – 25/5/2022 – Editeur d’origine : Sonatine (3/6/2021)

« Michael, dit-elle. Ton père est mort. Je l’ai poignardé. Prends ton vélo et va voir le Shérif Baxter. Tu dois lui dire d’envoyer le fourgon du légiste pour ton père et une voiture de police pour moi. Je suis quasiment sûre qu’ils me pendront pour ça, mais je veux que tu saches que je l’ai fait pour nous deux. Je passerai peut-être le restant de ma vie dans une cellule de prison, ou peut-être qu’ils voudront économiser un peu d’argent et se débarrasser de moi au plus vite, mais il est fort probable que ce soit la dernière fois que nous nous voyons, du moins en tant que mère et fils. Alors ne t’inquiète pas, ne pleure pas, et ne crois pas que c’est arrivé à cause de toi. Je l’ai fait pour toi, mais aussi pour moi, alors ne vas pas te flageller avec un sentiment de culpabilité, tu m’entends ? »

C’est le troisième livre que je lis de R. J. Ellory. J’avais bien aimé mes précédentes lectures, sans plus. Là avec « Le carnaval des ombres », j’ai eu un joli coup de cœur. Je me suis laissée happer par l’écriture de l’auteur, l’atmosphère, la profondeur et l’originalité des personnages. Je m’attendais à une enquête assez classique d’un agent du FBI. Alors bien sûr, l’agent spécial sénior Michael Travis vient à Seneca Falls pour mener l’enquête sur le meurtre d’un homme retrouvé sous le manège du cirque qui s’est installé à l’entrée de la petite ville du Kansas, mais ce n’est finalement pas cela l’essentiel de ce roman. On apprend à connaître la vie de ce Michael Travis dont l’enfance a été tout, sauf heureuse et tranquille. On découvre son passé, ses tourments, ses zones d’ombre qu’il gère comme il peut en les laissant à distance ainsi que son engagement au sein du FBI pour protéger la population, son admiration pour Hoover et sa loyauté envers le bureau. En arrivant à Seneca Falls, il est un peu fragilisé par un entretien avec un psy du bureau qui a finalisé sa promotion mais sûr de ce qu’il est : un excellent agent du FBI. Il vient sur le terrain pour sa première enquête en solo. C’est très important pour lui et la suite de sa carrière. Il s’applique à faire une enquête minutieuse comme il l’a appris. L’agent Travis se trouve alors confronté aux gens du cru avec leurs petits secrets, leur méfiance envers le FBI et surtout aux personnes du cirque. Ce sont des personnes toutes plus étonnantes les unes que les autres qui renvoient au fil des entretiens l’agent Travis à sa propre réalité, à sa vie, à ses convictions, à ses doutes, à ses fameuses zones d’ombre. Il en est assez déstabilisé. En particulier, les discussions avec Edgar Doyle, le patron du cirque, le troublent beaucoup. Petit à petit, tous les fondements de sa vie bien réglée d’agent du FBI se fissurent et les doutes, les questionnements surgissent et ne lui laissent plus aucun repos. Jusqu’où cela va-t-il le mener ? Je me suis aussi demandée où allait nous emmener l’auteur… Cette lecture décrit assez bien la vie dans une petite ville américaine dans les années 50. Je pense que l’auteur fait passer pas mal de ses idées sur le FBI et le gouvernement américain de cette époque via les dialogues de ses différents personnages. L’action n’est pas l’axe central de cette histoire mais pour une fois cela ne m’a pas gêné du tout. J’ai été gagnée par l’ambiance, les personnages, les introspections des personnages sur la vie, leur évolution. Passionnant et attachant. Les 768 pages ne m’ont pas pesé, bien au contraire. A découvrir sans aucun doute !

« Pour Michael Travis, ça avait été un changement, et un changement difficile. Quand il y repensait, c’était comme s’il avait deux types de souvenirs à l’horizon de sa mémoire : ceux d’avant et ceux d’après. Les premiers étaient sombres, les seconds plus sombres encore. L’avant signifiait la présence constante de la violence alcoolisée, de la férocité des explosions de son père, le tout tempéré par les deux facettes de sa mère, l’épouse au visage abîmé, ensanglanté, gonflé, qui avait à peine la force de respirer, et de l’autre côté sa vraie mère, aimante, curieusement toujours indulgente, persuadée qu’il suffisait d’y croire suffisamment pour que les choses s’arrangent. Mais ça ne s’était jamais produit, et maintenant il était trop tard. L’après était quelque chose de totalement différent, quoique tout aussi étrange, incommensurablement nouveau, et effroyablement réel. »

Lien vers la fiche du livre sur Babélio

https://www.babelio.com/livres/Ellory-Le-Carnaval-des-ombres/1411081

Note sur Babélio : 3,78/5 (269 notes) – Ma note : 5/5

« Tout ce que je dirai, murmura Doyle, c’est que les gens voient parfois simplement ce qu’ils veulent voir. L’esprit est puissant, Michael. Trop puissant pour être mis dans une boite. Trop puissant pour qu’on s’en cache. Trop puissant pour qu’on ne reconnaisse pas ses capacités inconnues et illimitées, et nous n’avons même pas gratté la surface. Comme vous ne le savez que trop bien, parfois les choses se produisent uniquement parce que nous croyons qu’elles vont se produire. Doyle tendit la main et toucha le bras de Travis. Ça devient plus simple, Michael, dit-il, tant qu’on ne lutte pas contre. »

L’auteur : R.J. Ellory

R. J. Ellory, de son nom complet Roger Jon Ellory, né le 20 juin 1965 à Birmingham, est un écrivain britannique, auteur de romans policiers et de thrillers.

Roger Jon Ellory n’a pas connu son père, parti avant sa naissance, et qui d’après son entourage aurait été un voleur hollandais…

Il habite dans une maison avec sa mère, son frère d’un an son ainé et sa grand-mère. Son grand-père est mort noyé en 1957.

La mère de Roger Jon Ellory était actrice, danseuse de ballet et chanteuse. À la suite d’une épidémie, elle meurt d’une pneumonie foudroyante à 28 ans alors qu’il a à peine 7 ans. C’est sa grand-mère qui va l’élever seule. Mais elle a une santé fragile, et finalement décide de le placer en orphelinat avec son frère. Il y reste jusqu’à l’âge de 16 ans. C’est là que se développe son amour de la lecture. Il découvre dans la bibliothèque de l’orphelinat les livres de Charles Dickens, Agatha Christie, Arthur Conan Doyle, Truman Capote, Harper Lee, Ernest Hemingway, William Faulkner, qui vont déclencher chez lui une envie de créativité dans le domaine artistique.

Il étudie la musique, joue de la trompette, dans le registre classique aussi bien que dans celui du jazz. Il fait des études d’arts, et étudie notamment la photographie.

À 16 ans, il abandonne ses études et retourne dans la maison familiale de Birmingham. Sa grand-mère décède malheureusement d’une crise cardiaque quelques semaines seulement après son retour. Il se retrouve seul, avec son frère, dans une maison où l’eau et l’électricité sont coupées. Pour gagner leur vie, ils décident de voler des légumes dans les potagers voisins et de les revendre. Ils volent également des poulets dans un monastère. Trois jours plus tard, les policiers leur rendent visite, accompagnés des bonnes sœurs du monastère. Elles identifient nommément chacun des poulets auxquels elles avaient donné les noms des provinces canadiennes… Ils sont condamnés à trois mois de prison.

Lorsqu’il sort de prison, Roger Jon Ellory monte un groupe de rock, « The Manta Rays », avec un bassiste et un batteur, Roger Jon jouant de la guitare. Ils commencent à construire leur studio d’enregistrement dans la maison, toujours sans électricité. Les rudes conditions de leur vie sont fatales pour leur batteur qui était asthmatique. Il meurt en pleine nuit dans le studio. Cet épisode dramatique conduit Roger Jon Ellory à se dire que la vie ne fonctionnait pas très bien pour lui. Il décide alors de poursuivre un but plus positif.

Son goût pour la lecture l’amène à vouloir aider ceux qui ont du mal à lire. Il fait donc des études sur ce problème.

Et le déclic se produit en 1987, à l’âge de 22 ans, alors qu’il voit un étudiant qui, entre deux cours, dans le couloir, est toujours très absorbé par la lecture d’un roman, toujours le même. Lorsque Roger Jon l’aborde, l’étudiant lui explique, enthousiaste, que c’est toujours ce roman qu’il veut lire, qui le passionne. Cela « allume une lumière dans la tête » de RJE qui explique : « je veux écrire des livres qui ont cet effet sur les gens ». Il se met donc à écrire tous les jours. En six ans, il produit ainsi 22 romans (thriller, polars, horreur…). Aucun ne sera publié. Il décide donc d’arrêter d’écrire.

Ce n’est que huit ans plus tard, en 2001, qu’il se remet à l’ouvrage. Et là, un éditeur anglais décide de lui donner sa chance. Après avoir reçu plus de 600 lettres de refus en provenance de 120 éditeurs, en 2003, son premier roman Candlemoth est enfin publié. En France, le succès est immédiat avec son roman « Seul le silence », prix Nouvel Obs/BibliObs du roman noir 2009, qui conquiert plus de 500 000 lecteurs. Et depuis, chaque année il publie un nouveau livre.

« Laura était une jolie fille – ça ne faisait aucun doute –, mais elle avait une sorte de maladresse délicate qui faisait clairement comprendre qu’elle n’avait aucune idée de son pouvoir de séduction. Travis supposa qu’elle approchait de la trentaine ; elle ne portait ni bague de fiançailles ni alliance, et à en juger par son attitude, elle semblait le trouver un peu intimidant. « Vous devez être l’agent secret Travis », dit-elle. Il s’esclaffa. « Eh bien, mademoiselle McCaffrey, si vous savez qui je suis, je ne dois pas être si secret que ça, n’est-ce pas ? – Oh, mince ! s’exclama-t-elle. J’ai vraiment dit ça ? J’ai dit agent secret ? – Oui, en effet. » Laura rougit visiblement. « Je suis tellement désolée. Je ne sais pas ce qui m’est passé par la tête. En fait, si, je le sais… du moins, eh bien… » Travis tendit la main par-dessus le comptoir. « Agent spécial Travis », dit-il. Laura lui serra la main. »

« Tout le monde a besoin de quelqu’un qui l’aime, et a besoin d’aimer en retour. C’est ça qui fait que la vie vaut d’être vécue. »

« Nous faisons ça depuis des siècles. Nous sommes la caravane des âmes perdues et des naufragés. Nous sommes ceux qui flottent à la limite de la société et qui sont vus avec autant de suspicion que de curiosité. »

« Mais le passé est un pays différent, poursuivit Greene. Le passé est un pays différent, et nous oublions parfois qu’on y parle une autre langue. Nous oublions cette langue, et nous oublions une partie de notre vie, et même si ça peut sembler ne pas être le cas, cette partie de notre vie est d’une importance absolument vitale. Pourquoi ? Parce que c’est le grenier, mes amis. Parce que c’est là qu’on trouve toutes ces boîtes humides et poussiéreuses. Parce qu’à l’intérieur de ces boîtes se trouvent les souvenirs dont on ne veut pas, et parfois il faut prendre son courage à deux mains, retrousser ses manches, gravir l’échelle qui mène aux combles de la maison et les rouvrir. »

« L’esprit, lorsqu’il a été étiré par une idée, ne retrouve jamais ses dimensions originales. »

« Nos peurs sont les seules choses qui confèrent aux autres un ascendant sur nous. »

« Je ne crois pas ce que je lis dans le journal. Je ne crois pas aux ragots et aux calomnies et aux diffamations que les gens racontent les uns sur les autres. Je juge un homme d’après mon expérience personnelle. De fait, certaines des pires personnes que la société a mises au pilori et diffamées se sont avérées être les plus méritantes, les plus courageuses, et parfaitement intègres. Ce que j’ai vu pendant la guerre, à défaut d’autre chose, me l’a appris. »

« Nous ne savons rien de vous, et pourtant vous pouvez venir ici et poser toutes les questions que vous voulez, et nous sommes obligés de répondre. Si vous voulez entendre quelque chose de déplaisant, vous pouvez écouter mon oncle. Il prétend que la seule différence entre une dictature communiste et les Etats-Unis, c’est la longitude et la latitude. Bon, il s’avère que je ne suis pas d’accord avec lui, et je sais qu’il peut avoir des idées très arrêtées et être intolérant, mais j’ai lu des trucs dans le journal à propos du sénateur McCarthy et de tous ces gens qu’il terrorise à Hollywood, et je commence à me demander si ce que mon oncle dit est vrai. Enfin quoi, vraiment, c’est pas si différent, n’est-ce pas ? Mettre des gens en prison à cause de leurs opinions politiques et Dieu sait quoi d’autre. Leur dire qu’ils doivent balancer leurs amis et ainsi de suite, sinon ils finiront derrière les barreaux. »

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Cette entrée a été publiée le 14 août 2022 par dans Livre, mes coups de coeur, Mes lectures, polar, policier, roman, et est taguée , , , , , , , , , , , .
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