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Nos cœurs disparus de Celeste Ng

« Elle faisait toujours ça, lui raconter des histoires. Ouvrir des brèches par où la magie pouvait s’insinuer, faisant du monde un lieu de tous les possibles. »

Résumé éditeur :

L’histoire bouleversante d’une famille qui lutte pour raviver l’espoir et la justice dans une société qui a cédé à la peur.
États-Unis d’Amérique, dans un futur pas si lointain. L’existence de tous est rythmée par des lois liberticides. Tout citoyen de culture étrangère est considéré comme dangereux pour la société.
Les livres tenus pour séditieux sont retirés des bibliothèques. À commencer par ceux de la poétesse Margaret Miu, disparue mystérieusement trois ans plus tôt. Bien décidé à la retrouver, son fils, Bird, aidé par un réseau clandestin de bibliothécaires, va peu à peu prendre conscience du sort des opprimés et de la nécessité impérieuse de porter leur voix.
Celeste Ng est de retour avec un nouveau roman bouleversant d’humanité et d’actualité. Porté par une écriture lumineuse, Nos cœurs disparus raconte le destin d’une famille en lutte pour raviver l’espoir et la justice dans une société qui a cédé au pire des conservatismes.

384 pages – 24/8/2023

« Ce qu’ils ne disaient pas, c’est que l’unité supposait un ennemi commun. Une boîte dans laquelle recueillir toute leur colère, un bouc émissaire à charger de tout ce qu’ils redoutaient. »

Mon avis

Me voici bien embarrassée pour rédiger cette chronique. Après avoir découvert récemment que « Nos cœurs disparus » figurait dans une liste des 10 livres incontournables de la dernière décennie (liste établie par Yvan dont j’aime lire les chroniques qui m’ont souvent permis de découvrir de jolis moments de lecture, merci à toi !), j’ai décidé immédiatement de l’extraire de ma PAL où il sommeillait paisiblement depuis un petit moment. De plus, la note sur Babélio étant assez élevée (4,06/5 à l’instant où j’écris cette chronique), je m’attendais à un gros coup de cœur ! A l’arrivée, une petite déception. Le sujet est pourtant prenant et important, c’est bien écrit mais je vous avoue que je me suis un peu ennuyée par moment, et la construction du récit m’a un peu perturbée. L’autrice nous projette aux Etats-Unis dans un avenir relativement proche sans nous donner d’explication. Par petites touches on finit par comprendre peu à peu la situation. Une crise économique considérable et dévastatrice a sévi dans le pays il y a une dizaine d’années. Mémorable, elle a provoqué un tel séisme économique au sein de la société américaine qu’elle a été surnommée « La Crise ». Après un moment de sidération puis d’abattement, les Américains ont cherché comme toujours (c’est assez humain comme réaction malheureusement) un bouc émissaire à leurs malheurs. La Chine a été désignée comme responsable de toutes les douleurs et difficultés qui s’acharnaient sur le peuple américain. Du coup, toutes les personnes qui ressemblaient de près ou de loin aux Chinois et plus largement aux Asiatiques, les POA (personnes d’origine asiatique), ont été victimes d’agressions et de répressions. Les livres ayant comme sujet la Chine, les Chinois, leur civilisation, leurs contes et légendes etc. ont été retirés et pilonnés. Et plus largement, profitant de cette situation délicate, l’Etat a instauré une loi liberticide, le PACT « Preserving American Culture and Traditions Act » : la Loi sur la sauvegarde de la culture et des traditions américaines. L’instauration du PACT a mis fin à la Crise. Mais a subsisté le racisme, la délation, les répressions arbitraires et finalement la suppression de la liberté d’expression. Des enfants ont été retirés de leurs familles pour les protéger de leurs parents (des POA, des anti-PACT etc.). C’est dans ce contexte tendu que démarre le récit de « Nos cœurs disparus ». La maman de Bird, Margaret Miu, une poétesse d’origine chinoise, quitte soudainement le foyer familial, laissant derrière elle son mari et leur fils de neuf ans. Peu de temps auparavant, un extrait de l’un de ses poèmes avait été repris par les opposants au PACT : « Rendez-nous nos cœurs disparus ». C’est à partir de ce moment que les ennuis ont commencé pour la famille de Bird. On va alors suivre Bird dans sa vie quotidienne devenue difficile, surtout qu’il ne comprend pas les raisons du départ de sa mère et son père se refuse à lui donner des explications. Vivre dans un pays totalitaire est chose ardue pour tout un chacun mais encore plus pour un enfant. Vous l’aurez compris le récit est souvent poignant et dénonce le racisme ambiant aux Etats-Unis. Personnellement, j’ai trouvé toute la première partie un peu trop lente et obscure à mon goût et j’ai nettement préféré la seconde moitié. Ceci dit cela reste un très bon livre. Découvrez cette histoire et faites-vous votre opinion, beaucoup ont aimé.

« On sait d’où c’est venu, commençaient à dire les gens. Posez-vous la question : qui profite de notre déclin ? Les doigts se tendaient fermement vers l’est. Regardez comme le PIB de la Chine est en hausse, comme leur niveau de vie s’améliore. Là-bas, vous avez des cultivateurs de riz équipés de smartphones, fulmina un député à la Chambre des représentants. Ici, vous avez des Américains qui font leurs besoins dans un seau parce qu’on leur a coupé l’eau pour défaut de paiement. Ne me dites pas que vous trouvez ça normal.
La Crise était l’œuvre des Chinois, se mettaient à affirmer certains ; toutes leurs manipulations, leurs droits de douane et leurs dévaluations. Peut-être même qu’ils avaient reçu de l’aide de l’intérieur pour démanteler le pays. Ils voulaient notre peau. Ils voulaient prendre possession des États-Unis d’Amérique. »

Lien vers la fiche du livre sur Babélio

https://www.babelio.com/livres/Ng-Nos-curs-disparus/1503656

Note sur Babélio : 4,06/5 (241 notes) – Ma note : 3/5

« PACT : la Loi sur la sauvegarde de la culture et des traditions américaines. La promesse solennelle d’éradiquer tous les éléments antiaméricains menaçant la nation. Des financements pour les milices de quartier afin de briser les manifestations et d’assurer le gardiennage des bureaux et commerces ; pour les projets créateurs d’emplois visant à produire en masse drapeaux, pin’s et posters encourageant à la surveillance mutuelle, et à réinvestir dans l’Amérique. Des financements pour de nouvelles initiatives destinées à surveiller la Chine, et pour de nouveaux comités de contrôle afin de repérer ceux dont la loyauté pourrait être duplice. Des récompenses pour la vigilance citoyenne, toute information susceptible de mener à de potentiels fauteurs de troubles. Et, enfin et surtout : empêcher la propagation des idées antiaméricaines en retirant discrètement les enfants des environnements antiaméricains… la définition desquels ne cessant de s’élargir : qui semble avoir de la sympathie pour la Chine ; qui semble insuffisamment antichinois ; qui exprime un doute sur quoi que ce soit d’américain ; qui possède le moindre lien avec la Chine, et ce quel que soit le nombre de générations écoulées ; qui se demande si la Chine est vraiment le problème ; qui se demande si le PACT est appliqué de manière équitable ; et, finalement, qui met en doute le PACT lui-même. »

L’autrice : Celeste Ng

Celeste Ng, née le 30 juillet 1980 à Pittsburgh, est une écrivaine américaine.
Ses parents ont quitté Hong Kong à la fin des années 1960. Son père, décédé en 2004, était physicien à la NASA au John H Glenn Research Center. Sa mère était une chimiste qui enseignait à l’Université d’État de Cleveland.
Après avoir été diplômée à Harvard, elle obtient, avec mention, un master de littérature à l’université du Michigan.
Pour écrire son premier roman, « Tout ce qu’on ne s’est jamais dit » (Sonatine Éditions, 2016), elle s’est inspirée de sa propre expérience et des difficultés qu’a rencontrées sa famille pour s’intégrer dans les États-Unis des années 1970. Dès sa parution, le livre est salué par la critique et les lecteurs et s’est vu récompensé du Massachusetts Book Award et du Medici Book Club Prize.
Dans son deuxième roman, « La Saison des feux » (Sonatine Éditions, 2018), Celeste Ng adopte pour décor une riche banlieue de Cleveland, et dépeint avec une rare acuité les fêlures qui menacent d’égratigner l’image de la parfaite famille américaine. Elle dresse également une galerie de portraits de femmes plus poignants les uns que les autres, ainsi qu’un constat sans appel sur les rapports humains dans nos sociétés contemporaines. Salué une fois encore par la critique et les lecteurs, le roman est adapté en minisérie en 2020 avec Reese Whitherspoon et Kerry Washington.
C’est avec son troisième roman, « Nos cœurs disparus », que Celeste Ng atteint la plénitude de son talent. Si on reconnaît la persistance de thèmes déjà explorés par l’auteure (les questions identitaires et sociales, la condition féminine ou la difficulté de l’héritage culturel), ce troisième opus s’assume comme un livre plus ouvertement engagé et politique, même si la force du propos s’appuie avant tout sur une écriture superbe et lyrique, qui a été comparée à celle d’Ernest Hemingway. D’une justesse remarquable et d’une émotion rare, « Nos cœurs disparus » a reçu un accueil dithyrambique et on ne peut plus mérité dans la presse, et s’est immédiatement classé dans les meilleures ventes du New York Times.
Celeste Ng vit aujourd’hui avec son mari et son fils à Cambridge, dans le Massachussetts, où elle enseigne l’écriture.

« Regarde, avait-elle dit – les premiers mots qu’elle lui adressait depuis l’incident. Bird, regarde ce que j’ai trouvé.
Un journal, les coins abîmés, l’encre un peu délavée, qui datait de deux ans plus tôt. Et là, juste sous la pliure, un gros titre à la une : « UNE POÉTESSE LOCALE LIÉE AUX INSURRECTIONS ». Une photo de sa mère, son sourire en coin dessinant une fossette. Autour de lui, le monde était devenu flou et gris.
Où est-ce que tu as trouvé ça ? avait-il demandé.
Sadie avait haussé les épaules.
À la bibliothèque.
C’est devenu le cri de ralliement des émeutes anti-PACT aux quatre coins du pays, mais ses racines sont là, terriblement proches de nous. La formule de plus en plus répandue pour attaquer la très populaire loi sur la sécurité nationale est née de l’imagination d’une femme de la région, Margaret Miu, tirée de son recueil de poèmes Nos cœurs disparus. Miu, fille d’immigrés chinois et mère d’un jeune garçon…
Les mots s’étaient alors brouillés sous ses yeux. »

« On ne brûle pas nos livres, poursuit-elle. On les pilonne. Beaucoup plus civilisé, n’est-ce pas ? On en fait de la pulpe et on les recycle en papier toilette. Ça fait longtemps que ces livres ont servi à torcher les fesses de quelqu’un.
Ah, lâche Bird. Voilà donc ce que sont devenus les livres de sa mère. Tous ces mots écrabouillés en une pâte grisâtre, puis emportés par une chasse d’eau dans un tourbillon de pisse et de merde. Il sent un liquide chaud mouiller ses yeux. »

« Et soudain, un déclic se produit dans l’esprit de Bird. Pourquoi son père est toujours aussi prudent, pourquoi il le harcèle pour qu’il suive tel ou tel itinéraire, qu’il ne s’éloigne jamais tout seul. Pourquoi son père l’a rejoint aussi rapidement tout à l’heure, dans le parc. Ce n’est pas seulement dangereux de faire des recherches sur la Chine ou sur les contes populaires japonais. C’est dangereux d’avoir la tête qu’il a. C’est dangereux d’être le fils de sa mère, à bien des égards. Son père l’a toujours su, s’est toujours préparé à quelque chose de ce genre, il a anticipé depuis longtemps ce qui finirait inévitablement par arriver à son fils. Ce dont il a peur : qu’un jour quelqu’un regarde Bird et voie en lui le visage de l’ennemi ; que quelqu’un le voie comme le fils de sa mère, par le sang ou les actes, et qu’il l’emmène. »

Ma lecture actuelle

9 commentaires sur “Nos cœurs disparus de Celeste Ng

  1. Yvan
    27 février 2024

    comme quoi, chaque ressenti est personnel 😉

    Aimé par 1 personne

  2. Light And Smell
    27 février 2024

    Ce n’est pas une priorité vu la taille de ma PAL mais le thème pourrait me plaire. Merci pour ton avis 🙂

    Aimé par 1 personne

    • Lilou
      27 février 2024

      Oui le sujet est vraiment important et intéressant !

      J’aime

  3. Rhooo, j’ai tellement aimé ce rom que je suis triste qu’il ne t’ai pas autant emportée que moi Lilou.

    Comme quoi la lecture est vraiment un moment personnel d’émotions personnelles. 🤩

    Aimé par 1 personne

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