Ma passion les livres

Partage de mes lectures

Le chant du silence de Jérôme Loubry

« Mais le temps ne cicatrise rien. Il se contente d’observer les blessures avec son air narquois et de les griffer de temps à autre pour les raviver. »

Résumé éditeur :

Il y a ce qu’on vous a raconté, ce que vous avez compris, ce que vous avez toujours cru… et puis il y a la vérité.

Lundi dernier, le père de Damien s’est jeté du haut de la baie des veuves, cette falaise d’où les femmes guettaient autrefois le retour des bateaux de pêche.

Damien se met donc en route pour régler les funérailles, tentant en vain d’éprouver de la tristesse. Durant l’été 1995, ce père qu’il aurait voulu aimer est devenu un meurtrier, les contraignant sa mère et lui à déménager à l’autre bout de la France car la ville entière maudissait leur nom. Damien n’est jamais revenu. La seule lumière dans ce pèlerinage douloureux est qu’il va revoir Oriane, son amour d’enfance.

Mais arrivé dans le quartier des pêcheurs désormais à l’abandon, Damien découvre dans la parka de son père une photo qui remet tout en question… Et si la vérité sur l’été 1995 était tout autre ?

Un thriller mêlant émotion et angoisse, proche du roman noir, qui avance par touches imperceptibles vers un dénouement aussi stupéfiant que bouleversant.

Un nouveau coup de maître !

400 pages – 4/1/2023

« Mais, alors que ma voiture filait vers mon passé, de mon propre abîme s’élevait le grondement de cette volonté, de ce désir resté trop longtemps inassouvi : je voulais voir son cercueil glisser dans sa tombe. Le regarder être recouvert de terre, lui qui ne jurait que par la mer. Et plus que tout, je tenais à cracher sur le cadavre de ce père assassin. »

Deuxième livre que je lis de cet auteur, Jérôme Loubry, et après cet excellent « Le chant du silence », ce ne sera pas le dernier ! Vous l’aurez compris, j’ai énormément aimé ce thriller sensible mêlant habilement nostalgie de l’adolescence, personnages attachants mais aussi suspense angoissant et chronique sociale. L’histoire se déroule dans une petite ville de pêcheurs en bord de mer sur deux périodes : 1995 et 2019. On suit principalement Damien, jeune adolescent en 1995, dont la vie familiale se détériore au fil du temps : un père marin qui peu à peu sombre dans l’alcool pour arriver à survivre sur terre et résister à la situation dramatique du port : les poissons sont de moins en moins nombreux et une marée noire détruit l’espoir en polluant les zones de pêche – une mère qui s’éloigne de son mari et veut à tout prix emmener son fils loin de la mer et de cet avenir sans perspective de marin. Heureusement en cet été 1995 Damien a des amis : Gustave, son meilleur ami depuis toujours et depuis quelques temps, la jolie Oriane, fille du patron des pêcheurs. Les trois sont inséparables. Mais Damien et Oriane découvrent l’amour après l’amitié… Des évènements dramatiques vont se dérouler dans cette petite ville qui vont tout changer et bouleverser à jamais la vie de tous les personnages de cette histoire. En 2019, Damien revient après une très longue absence dans sa ville natale dont le port est désormais à l’abandon pour enterrer son père, Jean dit l’anguille, qui se serait suicidé en se jetant du haut de la baie des veuves. Il est juste revenu pour tourner définitivement la page de ce père assassin, tant maudit. Son passé, heureux et douloureux, refait surface et rouvre des blessures que Damien pensait pourtant refermées à jamais. Ses certitudes vacillent et une autre vérité apparaît peu à peu. Soulagement et souffrance se mêlent. Le prix de la vérité est très élevé. Oui j’ai aimé ce thriller doux-amer, pudique, attachant, tout en émotion, très bien écrit, ciselé, qui m’a tenu en haleine jusqu’au bout. Gros coup de cœur que je vous conseille vivement.

« Alors Damien se contenta de songer au pacte qu’ils venaient de sceller. Il se dit que leur amitié éternelle coulait à présent dans leurs veines et que rien, pas même le temps qui passait, ne pourrait retirer ce sang de leur organisme. Cette pensée l’encouragea à déplier sa main pour caresser à son tour la peau de la fille du patron, le transportant loin, si loin que les feuilles des arbres se turent et que le silence recouvrit l’Univers. »

Lien vers la fiche du livre sur Babélio

https://www.babelio.com/livres/Loubry-Le-chant-du-silence/1471021

Note sur Babélio : 4,13/5 (97 notes) – Ma note : 5/5

« Oh ! Tu sais, les femmes, elles sont plus dangereuses que les sirènes. Les sirènes, au moins, on sait ce qu’elles veulent… Elles l’expriment. Mais les femmes… C’est leur silence qui est dangereux. Et ça, c’est pire que tout. Ça fait beaucoup de bruit le silence d’une femme, quoi qu’on en dise. »

L’auteur : Jérôme Loubry

Jérôme Loubry est né en 1976 à Saint-Amand-Montrond. Il a d’abord travaillé à l’étranger et voyagé tout en écrivant des nouvelles. Désormais installé en Provence, il a publié en 2017 chez Calmann-Lévy son premier roman, « Les Chiens de Détroit », lauréat du Prix Plume libre d’Argent 2018.

« 1995. « Regardez, la voilà… ». Les trois enfants observèrent la silhouette qui se mouvait avec lenteur. Lilly la folle longea l’orée du bois avec hésitation. Ses longs cheveux gris filandreux voletaient dans l’air au gré de la brise que l’océan soufflait depuis l’horizon. – Elle ne se souvient plus…, suggéra Oriane. – Si. Elle les retrouve toujours, à chaque fois. Il lui faut juste un peu de temps, murmura Gustave, attentif au cheminement de Lilly. Bien à l’abri derrière des buissons, ils la virent revenir sur ses pas puis finalement pénétrer dans le bois avant de disparaître entre les arbres. »

« Mon père était un homme pieux. À sa manière. Sa Sainte-Trinité se résumait ainsi, et dans cet ordre : moi, la mer et l’alcool. Retirez un seul de ces ingrédients et la recette du bonheur selon l’Évangile de Jean le pêcheur s’en trouvait affadie ou trop relevée, en tout cas émétique. Parfois, ma mère parvenait à se glisser dans son église pour chasser et remplacer l’alcool. Mais bien vite, comme elle me l’expliquerait des années après, elle comprit qu’elle avait plus de chances d’inverser une marée que de sevrer un homme aux croyances si solides, fussent-elles noyées dans un liquide brun titrant à 45 degrés. »

« Tu sauras ainsi pourquoi chacun d’entre nous se lève le matin : pour attraper nos rêves. Ne lâche jamais les tiens, gamin, il n’y a que toi qui puisses les harponner. »

« Tu es toujours là, Oriane. Tu es restée la même. Aussi belle. Aussi sensible. Aussi imprévisible que la mer. Tes cheveux blonds s’écoulent toujours jusqu’à tes épaules. Tes yeux bleus brillent avec la même puissance hypnotique. Te souviens-tu lorsque nous nous tenions debout face à l’océan, et que nous hurlions à en perdre la voix en espérant que nos cris atteignent les autres continents ? Rêves-tu encore de la silhouette squelettique de Lilly la folle s’affairant autour de ces « attrape-chats » que nous déplacions en secret ? Tu es celle qui me montrait les couleurs, Oriane. Tu n’avais qu’à sourire et les nuages disparaissaient… »

« Écoute ta mère, Damien, écoute-moi… Quand tout devient gris, concentre-toi sur ma voix… Entends mes paroles, laisse-les colorer tes angoisses… »

« Mais tu es un homme à présent, et tu devrais envisager l’idée que cette ville, et toi également, vous vous soyez trompés depuis le début… »

« As-tu déjà rencontré des silences qui te meurtrissent au point de vouloir fermer les yeux et prier pour que ce soit un mauvais rêve ? »

Un commentaire sur “Le chant du silence de Jérôme Loubry

  1. adoré aussi 🙂

    Aimé par 1 personne

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.